Le rapport d'activité 2020 de la Franche-Comté
Le Secours Catholique de Franche-Comté porte à votre connaissance son rapport d'activités 2020. Il peut être consulté dans PUBLICATIONS.
Vous pourrez y lire comment les acteurs salariés et bénévoles du Secours Catholique mobilisés ont fait face à la crise sanitaire dans les quatre départements de la Franche-Comté.
Avec les personnes en difficulté que nous accompagnons, nos actions ont rapidement quitté le stade de l'urgence pour s'enraciner dans celui de la relation dans la durée. Nous constatons que sans ce compagnonnage fraternel au long court, il n 'y a pas de sortie possible de la pauvreté.
Nous avons extrait quelques témoignages de ceux que nous accompagnons dans leur quotidien difficile.
Bonne lecture !
Les témoignages entiers p 7-8
Ana
A l’annonce du Gouvernement face à la situation du virus, j’ai été étonnée je ne m’attendais pas à ça. J’ai très mal vécu l’annonce du confinement, ça me rappelle ma petite enfance au Portugal avec Salazar, on n’avait pas le droit de sortir à plus de trois, c’était compliqué et ça a réveillé tous ses souvenirs. On ne peut plus vivre, ma famille est loin, ma fille est à Pontarlier, je ne peux même pas aller la voir. Je n’ai pas pu aller voir mon frère non plus, je le vis très mal. On n’a pas le droit d’aller voir la famille, les amis et quand je vais mal j’allais voir ma famille et mes amis pour me changer les idées, et là c’est plus possible. Je me baladais au lac, ramassais des champignons, on ne pouvait plus rien faire de tout ça.
Étant dépressive chronique, la crise sanitaire a agit en négatif sur mon moral. Je vais faire ça mais pourquoi faire, je reste là, plantée à faire mes mots fléchés et je commence à faire des cauchemars avec le masque. Je suis également claustrophobe, et dans mon rêve, c’est comme si on m’avait rongé le visage, tout ça me travaille, je suis très sensible. Je reste à la maison la plupart du temps car je ne supporte pas le masque. C’est comme si j’étais en prison, une prisonnière, chez moi avec l’angoisse qui monte. Il me tarde de pouvoir bouger.
Dès le début je l’ai mal vécu, je me suis renseignée sur toute cette histoire, ça me tracasse beaucoup et je me pose beaucoup de questions.
Concernant le Secours Catholique, j’ai pu aller à Morteau faire des réunions de territoire, avant Noël, on a fait des ateliers créatifs, de collage avec dames dons contre dons, on aurait aimé en faire plus souvent mais avec le confinement c’est compliqué. On a plein d’idées, de projets mais tout est en stand bye. J’ai fait les web retrouvailles, avec l’ordinateur, on s’était connectés à la salle du cercle et chacun pouvait parler. Il y a eu beaucoup d’évènements en visio, j’ai même une photo de l’écran où on est tous connectés. On a fait pas mal de choses, bien que ce n’était pas comme on aurait aimé. Je me sens un peu seule parfois pour faire les choses et j’espère qu’on pourra retrouver une vie normale bientôt.
Interview Ensieh et Mehdi
Comment vous avez vécu le confinement ?
Début mars, nous avons entendu plus sérieusement les nouvelles sur le virus, nous étions en France et on ne pensait pas que ça pouvait être aussi grave. On n’avait jamais été confinés tout comme nos amis français. La crise sanitaire à été très grave et difficile, à côté de ça nous sommes demandeurs d’asile car nous avons dû fuir l’Iran, nous étions obligés de quitter le pays. Mehdi est parti en premier, je n’avais aucune nouvelle de lui pendant un mois. Je l’ai rejoint en France car j’étais menacée en Iran. Nous avons laissé toute notre vie, le fils de mon mari est resté en Iran, c’est très difficile. Nous avons dû faire des démarches en France, pour les dossiers, des papiers… la procédure est longue, il faut savoir à qui s’adresser… Nous avons été en quelque sorte accueillis par le Covid et c’était très compliqué. Cette crise était quelque chose de plus à laquelle faire face avec notre situation. Nous sommes restés à la maison à peine arrivés en France, on n’avait pas le droit de sortir, on était emprisonnés à la maison, c’était une horreur. Les journées étaient longues, on avait beaucoup de préoccupations, la famille restée en Iran, les papiers, aucune activité, les tensions étaient présentes et ce premier confinement très difficile. Petit à petit nous avons fait la connaissance de Nicolas Oudot, l’animateur du Secours catholique du Doubs. On a eu la chance de trouver un logement grâce à lui, il nous a trouvé un bel appartement. Nous avons alors fait la connaissance du personnel et des amis du Secours catholique, Hélène, Christine, Antoine… Ils nous ont beaucoup aidé pendant le premier confinement. Juste avant le confinement nous avons eu un entretien à Paris, le Secours catholique a payé nos billets de trains, nous avons eu des tickets services, ils ne nous ont pas laissé seuls, ils sont toujours gentils, avec tous les migrants je crois.
Le premier confinement à été très difficile, entre le premier et le deuxième nous avons eu un peu de liberté, nous avons fait des sorties et rencontré des amis puis un deuxième confinement…
Depuis le premier confinement on a appris à s'adapter, on a trouvé des amis et grâce à ça nous avons pu avoir des livres, on faisait de la lecture. Les connaissances font des liens, nous étions au téléphone, en WhatsApp vidéo, ça faisait plaisir car on ne pouvait pas sortir, on a appris à s’adapter avec les difficultés du confinement même si une partie des problèmes existaient toujours avec les dossiers.
J’ai pu apprendre puis donner des cours de français au Secours catholique après le deuxième confinement, on était plus libres, c’était ouvert, on pouvait se promener.
En juin nous avons eu des tickets services ainsi qu’en octobre, ce qui nous a été d'une grande aide.
On est toujours là pour aider ou rendre des services au Secours catholique, pour récompenser leur gentillesse et leur aide. Je fais des cours de français, de traduction, Mehdi donne des coups de main si besoin…
Marc Vincent
J’ai aujourd’hui 43 ans et à la suite de l’annonce de viralité de la covid19 et du premier confinement, j’avais deux emplois de nuit essentiellement que j’ai perdu. En boîte de nuit, ce qui m’a valu une fin de contrat, j’étais également dans une station-service, à l’Air du Jura la nuit et tout a fermé. Les services de nuit ont été réduits au minimum, puis il a fallu réduire les charges, ça faisait 3 ans que j’étais là-bas, j’ai donc dû arrêter de travailler.
Le plus gros impact de la crise sanitaire est au niveau travail car à l’annonce du confinement, j’ai fait ce qu’il fallait, c’est-à-dire rester enfermé chez moi. Au départ on se dit que c’est pour sauver tout le monde, rester chez nous, porter le masque…
Au premier confinement il n’y avait pas beaucoup de masques, beaucoup d'associations et entreprises ont fourni des blouses pour les médecins. Il y a eu la création de l’association « Toile de Montgolfière » qui a fabriqué des blouses pour le monde hospitalier, les soignants. C’est la ville et les gens qui ont aidé, la solidarité est venue du peuple. Chacun a dû changer sa façon de faire, de travailler, les chaînes en usine ont travaillé plus, d’autres ont perdu leur travail. Un ami a dû recréer des chaînes pour la création de gel hydroalcoolique dans son usine. Je trouve que les gens se sont beaucoup mobilisés pour s’entraider.
J’ai été impacté personnellement, j’ai perdu mes emplois, ce qui a entraîné une perte de salaire importante. J’ai été licencié, la perte d’argent est énorme mais les factures arrivent toujours, pendant trois ans de suite j’ai cumulé deux boulots et je vous assure que vous oubliez la vie sociale. C’est-à-dire, les amis, les enfants. J’ai trois enfants, une fille et deux garçons adolescents, ils ne comprennent pas ma situation et notre relation est compliquée. Je ne peux même plus donner de pension depuis que je suis au chômage, j’ai des enfants qui m’en veulent… l’âge fait beaucoup, je ne leur en veux pas. Ils ont la chance d’être en apprentissage depuis leur 15 ans et de gagner des sous, mais sans mon aide c’est plus difficile. Ils sont dans l’incompréhension et ça crée des tensions. Quand on a un salaire, on se prend le droit d’un abonnement de ceci, de cela et avec un perte de salaire, on doit continuer à payer les factures.
J’en suis venu à être bénéficiaire du Secours catholique à la suite de cette grosse perte de salaire. Je n’avais plus de quoi payer mes factures donc forcément je n’avais plus de quoi me payer à manger non plus. C’est une amie qui faisait partie du Secours Catholique qui m’a parlé de l’association en octobre. J’ai assisté à une réunion et c’est comme ça que j’ai adhéré à son fonctionnement. Je suis rentré dans le Secours Catholique pour bénéficier des paniers solidaires du Jura, pour pouvoir manger tout simplement. J’ai perdu entre 800 et 900 euros de salaire par mois, ce qui fait un sacré manque à gagner. C’est important pour moi de suivre l’actualité de la page Facebook du Secours Catholique pour connaître tout ce qui se fait.
Concernant les paniers, il est possible de commander et de se faire livrer. Si la commande se fait par exemple le 2 du mois, elle sera livrée le 10, ainsi de suite.
Les paniers solidaires sont une superbe initiative avec des produits de bonne qualité. Personnellement, je partage souvent des photos des repas que je cuisine avec les produits du panier. Je recommence à cuisiner, ce que je ne faisais pas, je ne prenais pas le temps, je n’avais pas les moyens, la nourriture ça revient cher ! On calcule tout quand on fait les courses, on se demande « qu’est-ce que je vais pouvoir prendre ». Je remercie le Secours Catholique et la personne qui m’y a emmenée, je peux manger ! En plus, je mange mieux, je me suis tellement privée de manger. Quand il reste quatre yaourts le jeudi et que les enfants arrivent le dimanche, on se prive. Il faut s’accrocher. Il faut trouver des solutions, le troc, un bout de viande contre des patates etc. On en revient à ce que nos grands-parents ont vécu avec l’alimentation. On n’est pas tous égaux.
LYNN
L’annonce du premier confinement m’a rendu triste car ça voulait dire, rester chez soi entre 4 murs, ne pas pouvoir sortir ni voir de gens. C’était une sensation d’étouffement. J’avais envie de bouger, sortir mais il n’y avait pas d’endroit car tout était fermé. Je me suis sentie encore plus concernée par la situation car j’arrivais à peine et le confinement n’a fait que m’enfermer davantage.
Le "déconfinement" m’a permis de rencontrer de nouvelles personnes, c’est d’ailleurs à cette période que j’ai fait la rencontre du Secours Catholique. Alors, les réunions ont commencé, les découvertes puis à nouveau un confinement… On retrouve la tristesse, le manque de liberté puis on est "déconfiné" et à nouveau confiné, c’est un rythme où on n’est pas sûrs de ce qui nous attend demain, on se dit qu’on est libres pour un ou deux mois puis on est à nouveau enfermés. Mais, j’essayais de réfléchir à comment m’occuper pendant le confinement, comment utiliser tout ce temps et faire quelque chose pour que ce ne soit pas difficile. Je me suis créée des moments de sports, j’allais marcher, je lisais des livres et je gardais les liens avec les personnes au téléphone.
Début juin, après le premier confinement nous avons créé un groupe de femmes au sein du Secours Catholique. On a fait des activités, des journées fraternelles où chacune préparait un met de son terroir, de son origine. Je fais également des tresses, on fait des jeux, on dessine au tableau un objet et quelqu’un qui ne parle pas bien français doit dire ce que représente le dessin. J’ai également fait de l’assistance aux personnes qui ne s’en sortent pas bien en français, pour les rendez-vous chez le médecin ou encore à la préfecture, je m’occupe de la traduction et je les oriente vers des endroits qu’elles ne connaissent pas. Au Secours Catholique, on organise beaucoup de journées quand il fait beau et qu’on est "déconfinés", on a contribué à recueillir des dons de jouets, qu’on a nettoyés et vendus. On a également organisé le Frater’Noël, nous avons fait des cartes d’invitation, de la manutention (trier les dons de cadeaux) …